Il y a des événements catastrophiques dans la vie qui bouleversent notre société et nous font oublier nos petits malheurs quotidiens. En soi, ces événements ne constituent pas des psybonheurs mais ils semblent nous faire prendre conscience de leur fragilité. Et parfois, de ces drames collectifs naissent des psybonheurs que nous pouvons partager collectivement aussi.
« J'ai ressentis un grand bouleversement de la force, comme si des millions de voix avaient soudainement hurlé de terreur et puis s'étaient éteintes aussitôt, comme si un drame terrible s'était produit. » (Obi-Wan Kenobi, La guerre des étoiles : un nouvel espoir (1976), traduction libre)
Hier matin, Marie-Pascale me téléphone du bureau pour m'annoncer qu'un avion vient de foncer dans une tour du World Trade Center. Il n'est pas encore 9 heure. J'allume la télé : tous les canaux nous montrent une tour en feu. Et c'est pendant qu'on regarde, qu'un autre avion s'approche, descend et fonce droit sur la deuxième tour. C'est hallucinant, irréel ! Je reste bouche-bée devant mon écran. Les gens crient, tentent de fuir en voyant l'explosion. C'est la consternation, il n'y a plus de doute : c'est un attentat terroriste. On apprend rapidement que des avions ont été détournés par des pirates. Puis, à Washington, un autre avion fonce sur le Pentagone. Et puis un autre s'écrase sans atteindre sa cible.
Déjà le bilan était lourd : quatre avions en tout avec 265 passagers environ. J'en pleurais déjà quand le pire arriva : 90 minutes seulement après l'impact, je vois la deuxième tour s'effondre comme un château de carte. Imaginez une tour de 110 étages qui s'écroule. Environ 20 000 personnes y travaillent. Dans le passé, cela a pris 5 heures à évacuer le bâtiment.
Combien de morts ? Plus de 300 pompiers et 80 policiers manquent encore à l'appel. Et quelques heures plus tard la deuxième tour s'est écroulée. Je pleure en pensant à tous les secouristes qui sont mort en essayant de sauver des vies.
Je n'ai jamais vu une telle horreur. Je me sens profondément triste, profondément en colère. Je suis bouleversé. Je suis en maudit ! Un sentiment de haine m'habite soudain et me donne envie de raser tous les terroristes, ou tout le Moyen Orient...
Aujourd'hui, je commence à m'en remettre tandis que New-York ramasse ses morts et trouve quelques survivants. Et on a droit a un humanisme remarquable : les New-yorkais font la file pour donner de leur sang, il y a trop de bénévoles qui se présente sur les lieux, certains ouvrent leur porte pour accueillir des étrangers et des orphelins...
Je suis bouleversé, ému par l'humanité en action. Je suis bouleversé, horrifié et en colère contre l'autre humanité : l'inhumanité !
José, 12 septembre 2001.
Je me souviens que pendant des jours la voix d'Obi-Wan m'a hanté. J'ai eu beaucoup de difficulté à fonctionner normalement : travailler, manger et dormir. J'ai eu de la difficulté à me défaire de tous ces reportages télévisés sur l'événement. J'aurais aimé qu'on cesse d'en parler, mais cela aurait été injuste pour tous ces gens que j'y ai découvert, tous ces gens qui m'ont rappelé que, malgré tout, l'humain peut être profondément humain !
" C'est dans la plus grande noirceur que la flamme brille le plus. "
C'est ce que me rappelle ma femme dans de tels moments. Je pense alors à tous ces héros qui ont donné leur vie pour en sauver d'autres. Je pense aux donneurs de sang et aux bénévoles. Je pense aussi à ceux qui sont venu nourrir et encourager ces bénévoles à la recherche de survivants, pour qu'ils puissent survivre eux aussi. Je pense à ce policier qui libère un prisonnier de sa cellule pour qu'il échappe au désastre. Je pense à tous ceux qui se sont uni à travers le monde pour envoyer des messages de paix, de compassion ou de support. À tous ces fidèles de religions différentes qui se sont retrouvé pour montrer qu'il y avait encore de la fraternité humaine (malgré les dogmes). À tous ceux qui se sont mobilisé en même temps et fait descendre le taux de criminalité d'une mégapole de façon incroyable (presque le plus bas de toute son histoire).
Il est là mon psybonheur. Chaque fois que nous avons à traverser une crise majeure, il faut se rappeler qu'il y aura toujours un beau côté. Pour moi, ces événements ont surtout provoqué un rapprochement envers ceux qui comptent le plus pour moi et m'ont permis de me recentrer sur mes valeurs profondes d'humanisme, d'empathie, de sensibilité et d'être profondément émotif.
L'humain est vraiment capable du meilleur et du pire, on ne le changera probablement jamais. Il nous reste cependant la liberté de choisir. Je choisis de regarder le meilleur. Et vous ?
José, mars 2003.
Je repense à ce psybonheur chaque fois que je regarde le bulletin de nouvelle. Quand il y a des événements dramatiques, je pense notamment à Haïti qui a été balayée par un ouragan il y a quelques jours, je recherche les reportages qui nous redonne espoir, ceux qui nous montrent comment les humains sont capables de solidarité, et, à ce moment là, il est possible de supporter le pire, ou du moins de ne pas se laisser anéantir par le pire.
Et quand nos chers journalistes insistent uniquement sur le pire, je reprends ma liberté de choisir: Je change de canal, j'éteins le téléviseur ou, mieux encore, j'allume mon lecteur DVD, et je m'installe devant la dernière édition de la première trilogie d'une autre guerre, celle de mon vieux Ben qui nous rappelle que la force est en chacun de nous.
José, octobre 2004.