Anxiété - 5: Choisir consciemment une réponse à l'anxiété

Anxiété - 5: Choisir consciemment une réponse à l'anxiété

Il y a quelques années, j'ai vu un bon documentaire sur la peur (Les mystères de la peur dans la série Les grandes énigmes de la science sur France 2), un excellant document sur la peur et toutes ses composantes (le stress post-traumatique, la phobie, le plaisir qui peut y être relié, le comportement animal et humain, etc.). Saviez-vous que les mères Goéland ont une drôle de réaction pour protéger leurs petits :  elles poussent un cri aigu pour hypnotiser leur progéniture.  Ainsi, l'oisillon s'immobilise instantanément et le prédateur n'arrive pas à le différencier du sol.  Mieux encore, l'immobilité de la proie contrecarre le réflexe d'attaque du prédateur que provoque généralement le mouvement.  Se figer sur place devient donc un excellant comportement de survie.  Impressionnant ?  Pas pour ceux qui ont échappé à la mort en restant de glace face à un ours ou lors d'un vol à main armée...

Le documentaire nous montrait aussi comment certains emplois créent automatiquement une montée d’adrénaline considérée comme du stress ou de la peur nécessaire à leur survie.  Nous n’avons qu'à penser aux pilotes d'avion, aux pompiers ou aux policiers pour qui être conscient du danger qui les guette est essentiel.  Ils ont appris à écouter leur système d’alarme et à répondre à leur peur par l'action.  Ils agissent plutôt que de paralyser, et ils finissent par savoir quand il vaut mieux éviter ou fuir une situation et quand il est préférable d'affronter le danger. C'est suite au visionnement de ce film que j'ai songé à l'importance de vous parler de la règle des trois F.

Les FFF de la peur... Fuir, Foncer, Figer.

Face à la peur nous avons trois réponses possibles : la fuite ou l'évitement, le combat ou la confrontation et, la paralysie ou l'évanouissement,  (je crois que les anglophones parlent de Fight or Flight auxquels on peut ajouter Freeze).

Fuir

C'est la réponse la plus populaire chez les animaux.  La fuite est souvent le premier choix chez les humains parce qu'elle est plus simple que la confrontation et plus efficace que la paralysie.  Plus le zèbre court vite, plus longtemps il survit au lion.  Plus on se dépêche à sortir de la maison, plus longtemps on survit au feu.  De même, il revient à l'officier d'ordonner le repli de ses hommes lorsque la position des troupes n'est plus sûre ou stratégiquement viable.  Il est aussi recommandé d'utiliser cette stratégie de repli ou d'évitement dans la gestion de la colère.  Il est préférable de se retirer, prendre de l'air, faire une marche avant que la colère ne monte trop haut, même si cela peut vous faire peur : peur que l'autre personne impliquée n'ait rien compris, peur d'avoir perdu la bataille, peur d'avoir l'air d'abandonner, d'être un lâche, etc.

Par contre, nous n'avons qu'à penser à l'autruche pour comprendre que certain type de fuite ne sont pas très efficace : se mettre la tête dans le sable, fuir dans notre monde imaginaire, s'échapper de la réalité par la psychose, éviter systématiquement certaines situations, fuir dans le plaisir à tout prix plutôt que de prendre ses responsabilités, etc. L'approche comportementale-cognitive nous met en garde contre l'évitement qui, utilisée à outrance, installe rapidement une symptomatologie phobique.  En effet, c'est en évitant les gens qu'on développe la phobie sociale ou en évitant les foules que l'on fait l'apprentissage de l'agoraphobie.  Il en est de même pour tout ce qu'on évite trop souvent (phobie des chats, des couteaux, des ascenseurs, etc.).  Parce que plus on évite de se mettre dans une situation, moins on a de chance d'enregistrer des moments de bien-être dans cette situation.  Peu à peu, il ne nous reste que le souvenir du malaise et la peur de le revivre.  En évitant, nous gagnons un soulagement temporaire. À long terme, l'anxiété reliée à la situation que l'on évite s'est multipliée rapidement.

En guise de conclusion pour la fuite, je dirais seulement qu'il est essentiel de l'utiliser consciemment, c'est à dire volontairement plutôt que comme une espèce de réflexe.  Si vous avez conscience de fuir une situation, assumez le comme un choix personnel.  Si vous n'aimez pas la choisir, changer de réponse !

Figer

Qui n'est jamais resté figé devant un danger... et qui a survécu grâce à cette habileté d'être resté de glace dans une situation périlleuse ?  Nous pouvons penser à notre réaction face à un voleur ou à quelqu'un de colérique ou à toutes autres situations où nous nous sommes répété que le silence est d'or.  Oui, il est souvent possible d'éviter le pire en restant calme ou pétrifié.  Faire le mort a été longtemps considéré comme la seule façon de survivre à un ours, jusqu'à ce qu'on entende parler d'histoire où un ours un peu fou a décidé de jouer avec le mort comme un chat peut jouer avec le cadavre d'une souris.

Autrement dit, malgré certains avantages, figer sur place, se maintenir dans une situation réellement dangereuse peut vous être fatale. Par contre, lorsqu'on est dans une situation qui fait naître une peur irrationnelle ou de l'anxiété déraisonnable sans danger réel, il est la plupart du temps salutaire de demeurer dans la situation le plus longtemps possible car, en effet, il a été maintes fois démontré que de s'exposer longuement a un stimulus anxiogène irréaliste fait disparaître peu à peu la réponse anxieuse jusqu'à son extinction totale.  Autrement dit, face à une fausse peur ou un faux danger, notre réaction anxieuse finira par s'arrêter toute seule. L’alarme à incendie s'arrêtera tout seul quand le toast ne brûlera plus.

Foncer

Il est clair qu'une des meilleures façons de répondre à la peur est de la confronter.  C'est ce que nous demandons à nos enfants de faire quand ils ont peur qu'un monstre soit caché dans sa chambre : il se calmera après avoir exploré le dessous de son lit et le font de son placard avec quelqu'un de rassurant.  C'est une très bonne stratégie surtout lorsque la peur est déraisonnable ou lorsque l'événement qui nous inquiète est dans un avenir plus ou moins proche.  Par exemple, plutôt que de se tourmenter pendant plusieurs nuits, il est préférable de confronter notre conjoint(e) ou notre boss si nous supposons qu'ils ont l'intention de nous flusher.  De parler de nos peur avec les personnes impliqués peut dédramatiser beaucoup de situations intolérables.  Confronter des gens qui nous intimident est un bon exercice d'affirmation de soi, mais la confrontation doit être dosée. Par exemple, si nous fonçons avec trop d'agressivité, nous allons certainement provoquer une montée de la colère et engendrer parfois des conflits plus grands que celui que nous voulions régler.

Pour avoir déjà lu une histoire de campeur qui a échappé à la mort en fonçant sur l'ours avec des gestes et des cris intimidants, je pense qu'avec un peu de chance et beaucoup de jugement, foncer est la plupart du temps la meilleure réponse à la peur.  Avec beaucoup de jugement, il ne faut pas l'oublier.  Foncer tête baissée pour traverser à pied les quatre voies d'une autoroute en se disant qu'il faut se confronter à nos peur ne sera jamais une réponse adaptée.

Foncer n'est efficace que si nous savons ce que nous faisons, si nous sommes conscients de faire un choix et si nous sommes capables d'en assumer les conséquences.  Par exemple, si une jeune femme veut se confronter à sa peur de marcher seule au milieu de la nuit, vaut mieux qu'elle sache se défendre, qu'elle connaisse les moyens de réagir à une peur qui pourrait se concrétiser.

Conclusion sur les FFF

Il n'y a probablement pas une de ses trois réponses qui soient utilisable avec succès dans toutes les situations où nous ressentons la peur.  Nous n'avons qu'une seule certitude : nous pouvons apprendre à changer nos réactions à la peur. Il suffit d'appliquer la règle des C du Changement : Conscientiser, Comprendre, Choisir, Construire...

Nous pouvons commencer par prendre conscience de la façon dont nous répondons à nos peurs : utiliser des grilles d'observation, prendre des notes dans un cahier, écrire un journal intime, etc.  Puis essayer de comprendre nos façons de réagir : évaluer notre degré de satisfaction par rapport à nos réponses, nous questionner, analyser, identifier, expliquer nos comportements, lire ou consulter, etc.  Ces deux premières étapes ont surtout pour objectif de vous amener à faire des choix de sens et des choix d'action pour finalement vous construire vos meilleures façons de répondre à votre peur.

José St-Louis, M.Ps.

À suivre dans : Anxiété-6 : Comment traiter Mme Anxiété? Par l'auto-exposition!

Fait suite à : Anxiété - 4 : Choisir et sauter sur les bonnes occasions de stress.

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