Solitude
Mort
Chaos de l'espace-temps
Un triste voyageur
Seul au monde
Tout droit sorti de la machine
Observateur dissocié
En marge de la société moderne
L'étranger lucide
L'itinérant.
(Quelques mots pour mon tableau Itinérance)
28 septembre 2023, 5h du matin.
J'ai rêvé que j'étais mort. Je ne sais pas comment je le savais ou le sentais, mais j'étais mort. Je pleurais. Je ne voulais pas que ça se termine là. Je pleure encore.
J'étais là à errer dans un chez moi sécurisant que je ne voulais pas quitter. À un moment donné, comme si je réalisais que j'étais vraiment mort, je me suis senti désespéré et je me suis mis à courir. Je ne voulais pas partir pourtant. Je pleurais et j'en pleure encore.
Je saute sur le lit et je t'enveloppe dans mes bras. Je te serre contre moi « Moumour », pour te sentir, sentir que tu es toujours là, que je suis toujours là. Mais je sais que je suis mort et j'ai peur tout à coup de te faire peur. Car je ne suis qu'un fantôme qui s'accroche à toi.
Tu bouges un peu. J'ai même l'impression que tu pleures en me sentant près de toi alors que je suis mort depuis longtemps déjà, des années peut-être. Tu murmures : « oui, oui, je vais me lever », comme si tu sentais que je venais te câliner avant le lever. Et je te murmure : « non, non, tu peux rester couchée. »
Et je reste encore là, à te serrer contre moi, à ne pas vouloir partir, à me demander ce que je devrais faire maintenant. Je reste là longtemps, conscient que, pour toi, ce sont des nuits, pendant des années, qui passent sans moi. Je ne sais pas quoi faire. Je me dis que j'aurais pu être plus attentif à toutes mes lectures spirituelles sur la vie après la vie. J'ai juste envie de t’enlacer encore et encore. Ne pas bouger du lit, avec toi, chez moi.
Je me réveille en pleurant. De cette tristesse que j'associée à la solitude. Je pense à mon tableau dont tu m'as donné le titre : Itinérance.
Je pleure encore.
J'enlève mon bouchon de mon oreille pour mieux entendre, à la recherche du souffle de ta respiration. Je m'assure que tu es bien vivante. Tu dors paisiblement, sans ronflement. Je pleure, mais je ne te serre pas dans mes bras, parce que je ne veux pas t'empêcher de dormir à cause de ma peur, non, plutôt ma peine… ma peine de mourir.
Je me lève pour aller écrire ces quelques mots, assis sur le bol. Il devient très inconfortable, et ça me rappelle que j'étais aussi là avant de me recoucher et de faire ce rêve. Je m'étais levé pour faire mon pipi, et j'avais l'impression de ne pas me sentir bien. J'étais préoccupé par ma santé et par une peur de mourir si je ne faisais pas attention à moi. Et j'étais allé me recoucher. Ce que je vais refaire parce que j'ai mal aux fesses.
J'espère retrouver une paix intérieure et continuer à vivre ma vie. Conscient que je ne veux pas la perdre. Ça me ferait encore beaucoup trop de peine. Je ne suis pas prêt. Je n'ai pas envie d'errer dans le chaos comme le personnage de mon tableau. Seul et nulle part. Avec des vêtements d'une autre époque. Comme si le temps avait continué sans moi.
Non, je veux être là, je veux vivre encore tout ce temps qui passe. Me rapprocher de l'éternité avant de mourir.
Le 16 octobre 2023, José est encore troublé par ce rêve. D’autant plus qu’il a mal à la hanche et à la jambe droite. Cette douleur qui ne semble pas vouloir le lâcher depuis des jours exacerbe ses inquiétudes par rapport à sa santé, à sa longévité, à son futur et à sa mort. Son corps lui rappelle qu’il s’en demande peut-être trop, qu’il doit être plus doux avec lui-même, qu’il doit prendre des décisions en pensant davantage à lui-même. Ce qu’il fait.
Pour se calmer un peu, il se recueille avec lui-même. Il me regarde. Il feuillette les pages de mon premier gros cartable, celui de 1978 à 1981. Il a peine à les tourner sans les déchirer tellement le papier usé par le temps est friable contre les gros anneaux. Et c’est là, par hasard, par synchronicité, qu’il tombe sur un travail scolaire pour son cours d’enseignements religieux de secondaire V dans lequel il fait une réflexion sur l’au-delà.
Ce petit extrait de mon travail sur l’au-delà m’a un peu réconcilié avec la mort. Il y a certainement une vie après la mort, peu importe comment. Je pense moins à un paradis (le royaume de Dieu) ou à un enfer (chez Satan), sauf si ça se passe comme dans l’un de mes films préférés, Au-delà de nos rêves1. Je ne crois plus non plus à la notion de fin du monde et de jugement dernier (comme je le décrivais sur la page suivante de mon travail). J’ai l’impression que tout se transforme, se métamorphose, et qu’il y aura toujours un endroit où aller, même après la fin de l’humanité ou de la vie sur Terre. « Tu es poussière et tu retourneras en poussière »… en poussière cosmique. Il y aura toujours une autre dimension pour exister, un autre corps pour se réincarner, un autre état de conscience pour notre âme.
J’aime bien que dans mon rêve, je suis conscient d’être mort. Je suis encore conscient d’exister. Je suis triste d’avoir perdu cette vie et mes proches, je m’y accroche encore, quitte à errer en fantôme, comme – attention spoiler – le psy dans un autre de mes films préférés, Le sixième sens 2. Quoique j’avais plus l’air de jouer dans Un fantôme d’amour !
Et je ne crains plus le jugement dernier. Je ne crois plus au Dieu vengeur des religions occidentales (judaïste, chrétienne ou musulmane) qui va nous punir si on se comporte mal. J’ai écrit, il y a bien longtemps : « Une seule maxime peut expliquer la rigidité et l'intolérance des dogmes religieux : Le premier jour, l'homme créa Dieu à son image.3» Pas parce que je ne croyais plus en Dieu, mais parce que je ne croyais plus aux religions et à leurs dogmes, à leur manière de définir Dieu qui ne sert qu’à donner plus de pouvoir à leurs dirigeants et à leurs fanatiques.
On s’est inventé un Dieu terrible parce qu’on avait besoin d’un Surmoi, d’un guide un peu tyrannique pour nous aider à survivre. Chacun de nous passe par là en étant enfant et on a intérêt à identifier ce Parent critique que l’on a intériorisé et qui nous mène la vie dure en nous faisant sentir coupable pour des petits riens. Ce Dieu que l’on devrait craindre n’est plus aussi utile qu’au début de l’humanité et on devrait apprendre collectivement à assouplir nos rapports avec Lui comme on doit apprendre individuellement à se libérer du Surmoi pour s’épanouir pleinement.
Je crois maintenant que Dieu est une grande source d’énergie dans laquelle, d’une part, nous pouvons puiser pour recharger nos batteries et nous aider à traverser les difficultés de l’existence et, d’autre part, que nous pouvons alimenter grâce à notre propre énergie positive. Je pense que notre âme, notre vrai Soi, notre petit enfant naturel intériorisé, enraciné dans notre corps, est la partie divine en nous. C’est en ce sens que je crois que Dieu est en chacun de nous, à travers cette source d’énergie renouvelable et collective, cette vitalité que nous chargeons et déchargeons, cette énergie qui circule en nous et entre nous.
J’ai une pensée bienveillante en pensant aux Juifs, aux Palestiniens, aux Russes et aux Ukrainiens qui s’entredéchirent en ce moment même. Je pleure encore en pensant à eux, avec de longs frissons qui me parcourent le corps. Je pense que cette énergie bienveillante est divine et qu’à travers ce Dieu auquel je crois, elle se transmet à certaines personnes impliquées dans ces conflits pour stimuler leur humanité bienveillante.
Voilà où le rêve de ma mort m’a ramené : à ma propre spiritualité, d’hier à aujourd’hui. Et à l’espoir d’une longue vie avec mes proches, dans un monde plus harmonieux, solidaire et bienveillant.
José, 17 octobre 2023.
Conclusion générale de mon travail scolaire4
(réflexion sur la violence, l’égalité de la femme, la force, les médiums et l’au-delà)
Comme vous avez surement constaté, il y a dans toute ma réflexion quelque chose qui est revenu très souvent, mais que j’ai oublié de vous dire : je suis borné ! Oui, je suis borné sur une seule chose : l’existence de Dieu.
Que ce soit : dans la violence, Dieu peut nous aider à la combattre; dans l’égalité de la femme, il faut prouver notre bonté à Dieu en se battant contre le sexisme; dans la force, Dieu en est le créateur; dans les médiums, il faut croire en Dieu pour utiliser nos pouvoir dans le bien; dans l’au-delà, Dieu en est le fondateur.
Dieu est partout : dans le ciel, sur la Terre et dans nos cœurs.
Quoiqu’il arrive, il faut respecter les règles de Dieu, c’est-à-dire qu’il faut vraiment suivre les deux commandements de Jésus : « Aime ton Dieu plus que tout au monde », a-t-il dit, et « Aimez-vous les uns les autres », a-t-il ajouté. En suivant le deuxième, le premier est respecté, car Jésus a aussi dit : « Tout ce que tu fais au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que tu le fais. »
L’important dans la vie, ce n’es pas de comprendre, mais bien d’aimer. Car comme disait Oscar Wilde : « Aimer, c’est se surpasser. »
José, 22 avril 1981.
À suivre dans : Bio-23 : Suite du journal aux puces d'un finissant
Fait suite à : Bio-21 : Triste solitude ou tristesse solitaire
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Notes, références et légendes des figures (numérotées de haut en bas)
Fig. 1 : José (2023, septembre). Itinérance. Technique mixte (encre, aquarelle, pastel, acrylique, collage) sur toile (10 x 10 pouces).
Fig. 2 : Photocopie de la page 25 du travail scolaire de José, Réflexion 4.
1 : M. Psytami fait quelques commentaires sur ce film. Voir dans la Psynémathèque : La vie a-t-elle toujours un sens ?
2 : M. Psytami fait quelques commentaires sur ce film. Voir dans la Psynémathèque : Folie ou phénomène inexpliqué ?
3 : Citation de José qui fait partie des 15 plus belles citations sur l’intolérance selon Le Figaro. http://evene.lefigaro.fr/citation/seule-maxime-peut-expliquer-rigidite-intolerance-dogmes-religie-55379.php
4 : St-Louis, J. (1981). Réflexion : La violence, l’égalité de la femme, la force, les médiums et l’au-delà. Travail présenté à Monsieur Léon Thériault. Enseignement religieux, secondaire V, Polyvalente Jeanne-Mance, Montréal. 28 pages. Document inédit.
N.B. : Le texte ci-dessus est basé sur une histoire vraie. Cependant, n'oubliez pas que :
1) mes avertissements généraux s'appliquent aussi aux textes de cette section ;
2) il s'agit de ma propre vérité, à partir de mes points de vue et jugements personnels du moment ;
3) la mémoire est toujours un processus de reconstruction mentale et une faculté qui oublie ;
4) presque tous les personnages ont des noms fictifs.